Dans ce monde cruel

Porco mondo
Porco mondo
mardi 12 mars 2024, 14:30
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À la galleria Toledo, théâtre permanent d'innovation des quartiers Espagnols, dirigé par Laura Angiulli, du jeudi 14 mars au dimanche 17 mars 2024, Fattore K, Gruppo della creta et la compagnie Biancofango présentent «Porco mondo», une dramaturgie de Francesca Macrì et Andrea Trapani avec Aida Talliente et Andrea Trapani, mise en scène par Francesca Macrì. Du jeudi au samedi à 20h30, dimanche à 18h.

Un homme. Une femme. Un couple. Une chambre. Un mois. Décembre. Une nuit. Celle de Noël. La neige qui recouvre tout et efface tout. L'aube qui surprend l'obscurité révèle les désirs obscènes, consume les pensées, bouleverse les âmes, mène à l'usure. Les voici. Les époux rebelles. Les amants épuisés. Les voici. Le survivant et le bourreau. La rencontre des opposés. Rien ne les satisfait. Rien ne les rassasie. Mais où s'échapper pendant qu'on se rencontre?

Ils n'ont pas de noms, cet homme et cette femme. Ils pourraient s'appeler de n'importe quelle manière. Ils cachent, malgré eux, malgré nous, quelque chose d'ancestral, d'atavique. Ils n'ont pas de noms et n'en auront jamais pendant tout le spectacle, cet homme et cette femme. Parfois, ce n'est plus suffisant d'être comme on est. Et pour dire des choses qui, peut-être, autrement resteraient enfermées dans la gorge, elle porte, maladroitement, des vêtements de Marilyn Monroe. Aucun nom, donc, et, apparemment, une maison qui pourrait être n'importe où.

N'importe où, dans ce monde cruel de banlieues. Une fenêtre, comme dans un tableau de Hopper, divise les espaces. Là, on regarde, là, on attend. Le lieu du vide et du rêve, de la trépidation et du silence. De la pensée. Dedans, dehors. Dehors, dedans. On n'est jamais vraiment là où on est. Les yeux aperçoivent, au-delà du verre, un viaduc, les rails du tram et des maisons, des maisons partout. Des maisons. On croirait voir illuminées les fenêtres de ces maisons. Les lumières de Noël trompent les yeux. Chaud dedans et froid dehors. Et on ne sait pas combien l'un est vrai et l'autre faux. Enfermés dans cette chambre-cage-tombe, cette Marilyn bon marché célèbre pour son homme la fête de Noël.

Elle a tout organisé ou peut-être suit-elle seulement l'instinct d'une nuit. Une nuit sans grâce. On ne sait pas. Lui, il la suit parce qu'il ne pourrait rien faire d'autre. Il la suit parce que, de ce monde cruel, de cette ville maudite, il est le premier des habitants. Et aveuglé par des désirs et des remords qui se mélangent à une vitesse inouïe, il découvre, sur sa peau, que parfois aimer signifie dévorer. La chair est sang, dit-on. Et le sang monte à la tête, monte à la tête surtout aux épouses bacchantes qui, sans thyrse, dans cette décomposition du début du nouveau millénaire, pensent que beaucoup de choses sont possibles, mais une seule nécessaire. Et donc, la voici, la bacchante épuisée, la poupée brisée, cette chair mutilée à la recherche de chair impie, traîner cet homme vers le bas, toujours plus bas. Et lui est là et n'est pas là. Il est là et voudrait être ailleurs. Il est là et pense à autre chose.

Nous, quand nous sortons du théâtre, nous les imaginons au centre de cette chambre, sans portes, sans issues. Et vraiment, on ne comprend pas qui est le plus vivant et qui est le plus mort. Après tant de tumulte, enfin, le silence. La neige tombe. Personne ne semble s'être aperçu de rien. Nous les regardons, de loin, et pensons : combien est féroce, combien est aveuglante la sensualité des vies désespérées.

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